28 févr. 2008

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Et nous, citoyens européens, qu'est-ce qu'on attend pour arrêter de se faire enc....?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Comment les classes dominantes organisent la pénurie dans une des sociétés les plus riches du monde.

Dans le Monde Diplomatique de janvier, François Ruffin, en évoquant une étude de la Commission européenne, revenait très justement sur la question du partage du PIB entre salaires et profits. Cette étude démontrait que la part des salaires avait baissé de 9% entre 1983 et 2006 au profit… des profits. Sur un PIB de 1800 milliards d’euros cela représente grosso modo 150 milliards d’euros. Soit 12,5 fois le « trou » de la sécu (12 milliards) ou 30 fois le « déficit » des caisses de retraites (5 milliards). Tous les ans c’est 150 milliards d’euros soustraits ainsi à la collectivité par une petite minorité d’actionnaires.

On voit ici toute la rouerie et l’imposture d’un Sarkozy quand il vient nous raconter l’histoire des « caisses vides ». Alors qu’il est au pouvoir depuis des années il fait semblant de découvrir un fait récent. En fait tout le monde « le savait déjà ». On le sait tous depuis des années. On nous l’a assez répété, seriné, chanté le « trou » de la sécu, la faillite des retraites, les déficits de l’Unédic, des milliers, des millions de fois que les journaux et Jean Pierre Pernaut nous le répètent : les caisses sont vides et si elles ne le sont pas encore elles le seront sûrement un jour ou l’autre. A moins d’un miracle…
Justement on l’attendaient le miracle. Juste un tout petit miracle. C’est un peu pour ça aussi qu’on l’avait élu, le petit Nicolas. Hélas le miracle n’a eu lieu. Le petit Nicolas nous a déçus. Et le père Noêl ne s’est même pas dérangé. A préféré aller trinquer avec ses copains à bord d’un yacht, au large d’une île peuplée des belles nanas, où il y a des apéros et des cacahouettes à volonté…
C’est clair Sarkozy prend les français pour des demeurés. Et son imposture est tellement grosse que beaucoup en restent pantois. On est même frappé par le silence assourdissant qui entoure de tels propos. Comme si sur cette question il y avait un consensus de la société toute entière. Remarquez qu’on n’a pas entendu beaucoup de réactions, venant du monde politique ou syndical, contestant le verdict. Au point même que l’on se demande si cela ne relève pas d’un silence honteux de la part de certains partis politiques de « gauche » peut être même d’une certaine complicité. Car finalement le diagnostic sur cette question est largement partagé « à gauche ». Si ce n’est pas dans les faits, au moins c’est dans les esprits : les « caisses sont vides ». C’est un acquis. On ne revient pas là-dessus. Et bien avant que Sarkozy viennent mettre un point final à la question.
Mais on pourrait résumer aussi les choses autrement : l’objectif des politique, de droite comme de « gauche », depuis plus de 20 ans, était justement…de « vider les caisses » ou du moins de ne rien faire pour les remplir. Et les gouvernements le savaient très bien, qu’il n’y avait de contre-réforme possible et acceptée que sur cette base là. Qu’il fallait donc préparer les terrain, les conditions matérielles et mentales de la contre offensive patronal. Et pour cela absolument créer et entretenir les difficultés financières, réelles ou fictives, peu importe, pourvu qu’on obtienne la résignation générale. On imagine donc sans peine l’intense plaisir de Sarkozy à annoncer de tels « constats ». Qui en fait là l’annonce de sa véritable victoire…

Comment les classes dominantes ont-elles organisé ce hold-up et comment font-elles peser une menace de réelle pénurie sur les finances publiques et la sécurité sociale ?

Restructurations et suppressions de postes, chômage de masse externalisé sur la collectivité, chantage à l’emploi et stagnation des salaires, travail précaire et salaires partiels ont été les armes principales de ce hold-up du siècle.

Mais parmi toutes ces armes de destruction massive il y en a une sur laquelle je voudrais revenir : c’est le processus par lequel le salaire socialisé (les cotisations) a été un des instruments privilégiés du patronat pour réduire la masse salariale. Et comment les employeurs ont réussi à reporter sur les contribuables la charge de financer la sécu.

Les suppressions ou les diminutions massives de cotisations sur les bas salaires c’est, au bas mot, 23 milliards en 2006. Fait partie du même dispositif, le gel des cotisations sur l’ensemble des salaires : la cotisation assurance maladie est bloquée à 13% depuis plus de 15 ans. Là il faudrait évaluer le volume de la masse salariale si la cotisation maladie avait évoluée en fonction des besoins de financement : probablement aux alentours des 50 milliards d’euros (12 milliards de déficits plus l’équivalent versés en CSG). Même chose pour l’Unédic : au moins 50 milliards d’euros supplémentaires pour indemniser correctement tous les chômeurs. Et j’en passe. Autre manière encore de réduire le salaire indirect a consisté dans le retour à de modes de rémunérations exonérés de cotisations (épargne salariale, primes diverses, primes d’intéressement, actionnariat salarié, stock-options, etc…)

Si le basculement des rapports de forces en faveur du patronat expliquent en partie cet accaparement de la richesse, il n’explique pas tout, et notamment les raisons pour lesquelles, dans l’ensemble, les travailleurs et les représentants syndicaux ont accepté, ou se sont résignés à ce qu’on s’attaque, au nom de l’emploi, aux « charges sociales ».
Si la patronat avait dit clairement aux salariés : « Bon, aujourd’hui, pour maintenir les emplois on va diminuer vos salaires »… on imagine sans peine les réactions que cela aurait suscité chez les salariés. Mais le patronat a préféré l’attaque indirecte : « Pour maintenir vos emplois on va diminuer les « charges sociales » »…et ce message là est passé. Avec des réticences certes, car les salariés savent confusément que les « charges sociales » cela a à voir, quelque part avec la sécurité sociale. De même qu’aujourd’hui, le message : « Si vous faites des heures supplémentaires totalement exonérées de cotisations et défiscalisés…vous gagnerez plus » passe aussi d’une certaine manière… Et pourtant, de telles mesures, par leur incidence directe sur les finances publiques et la sécurité sociale, c'est-à-dire sur l’ensemble de la collectivité, relèvent d’un véritable suicide social !

Sur ce point précis les mobilisations n’ont jamais été à la hauteur de telles attaques. Pourquoi ?
La sécurité sociale, comme les finances publiques, relèvent d’une forme de socialisation des ressources. Que cette socialisation fasse l’objet, de la part des classes dirigeantes, d’un véritable déni c’est un peu normal : le patronat ne peut pas concevoir qu’une sécurité soit sociale et non pas individuelle. Que le monde académique et ses demi savants fasse des lectures erronées sur la Sécu, cela peut se comprendre aussi, bien que cela puisse porter à conséquence si on prend ces lectures au sérieux. Mais que des travailleurs, jeunes ou vieux, en activité ou au chômage, partagent la même vision du salaire que le patronat c’est déjà plus problématique.

Pourquoi les cotisations, devenues « charges sociales » sont-elles aujourd’hui la cible préférée du patronat. Car elles ne sont pas perçues comme du salaire. Pour les salariés est « salaire » ce qui relève du sens commun libéral, c'est-à-dire ce qui apparaît en bas de la fiche de paie. Du coup une part non négligeable du salaire, près de 40% du salaire total, la part socialisée, n’a qu’une faible existence dans les représentations individuelles et collectives. Et cette représentation, quand elle existe, n’est autre que celle du patronat : ce sont les « charges sociales » dont tout le monde s’accorde pour estimer qu’elles sont trop élevées, plombent la compétitivité des entreprises sur le marché mondial, et donc pèsent sur l’emploi, etc….

Un combat à mener : la hausse des cotisations sociales (patronales) pour financer la sécu à hauteur des ses besoins.

François Ruffin a raison de démontrer, chiffres à l’appui, que les richesses créées ces dernières décennies ont été accaparés par les actionnaires et les capitalistes. Mais nous ont fait aussi cruellement défaut les raisonnements intellectuels qui nous aurait permis de saisir comment la notion de cotisation, de mutualisation, de salaire indirect, bref toute cette part de la richesse créée par le travail, puis mutualisée dans le pot commun de la sécu, à été petit à petit rognée par les capitalistes et concédée par les travailleurs, sans coup férir ou presque.

Sans une lutte explicite, à la fois intellectuelle, politique et idéologique, pour cette partie socialisée du salaire et contre toute « baisse de charges sociales », patronat et forces politiques de droites, comme de « gauche », continueront à s’attaquer aux « charges sociales ». Illustration : dans le même article François Ruffin cite le député socialiste Michel Sapin qui préconise « une diminution des charges sociales des entreprises qui auront conclu des négociations salariales» (sic). Bref un énième marché de dupes où les miettes qui auront été glanées pour le salaire direct seront aussitôt récupérées par le patronat par diminution du salaire indirect…On le voit, en la matière, c'est-à-dire comme zélateurs de la diminution inéluctable de la masse salariale, les socialistes persistent et signent. Avec comme résultat que les capitalistes continueront à rogner inexorablement la part socialisée du salaire et donc à vider encore plus les caisses de sécu, à menacer de pénurie les ressources publiques, et indirectement, à instiller la peur de l’avenir.
Seront ainsi réunies toutes les conditions idéologiques et psychologiques pour relancer l’épargne individuelle comme forme de sécurité et du même coup l’industrie de l’accumulation financière au profit des capitalistes.

Dans un article datant du 16 février l’économiste Michel Husson disait :
« que la légitimité du capitalisme est aujourd’hui profondément atteinte. […] Même si les rapports de force sont en sa faveur, une chose au moins devrait être claire : les projets visant à réguler, discipliner ou humaniser un tel système relèvent dans le contexte actuel d’un pure utopie, au mauvais sens du terme. La seule attitude cohérente aujourd’hui est au contraire d’opposer à ce « pur capitalisme » un « pur anticapitalisme » proportionné aux menaces qu’il fait peser sur le bien-être de l’humanité »
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« Le capital est du travail mort, qui, semblable au vampire, ne s’anime qu’en suçant le travail vivant, et sa vie est d’autant plus allègre qu’il en pompe davantage »
K. Marx


Article de Michel Husson :
http://hussonet.free.fr/kerviel8.pdf

Joaquim Soares (Valenciennes)