14 juin 2011

Le Portugal à l'assaut des agences de notation



(Article de François Musseau - Libération 14/06/2011)

"Un procès à Lisbonne contre Moody's, Fitch et Standard & Poor's ? On n'y est pas encore, mais le procureur général de la République portugaise a déjà rassemblé des éléments à charge et étudie la possibilité de donner suite à des plaintes déposées par des économistes."Déjà, on crée un précédent. Tout le monde courbait l'échine face aux agences de notation. Maintenant, elles sont dans le viseur de notre colère citoyenne." José Manuel Pureza, professeur de fac à Coimbra et député du Bloc de gauche (BE), est l'un des quatre plaignants portugais. Il se fait le relais d'un semtiment d'hostilité généralisé contre les agences de rating américaines, qui n'ont cessé d'abaisser la note de l'économie portugaise.

Beaucoup les accusent d'être à l'origine de taux d'intérêt "usuriers" (autour de 10%) pour le remboursement d'une dette publique atteignant 92% du PIB, et d'être les grands responsables de l'effondrement du pays.
Après la Grèce et l'Irlande, le Portugal a en effet dû solliciter une aide financière internationale. Et le prêt que lui a concédé la troika Fonds monétaire international, Bruxelles et Banque centrale européenne atteint 78 milliars d'euros.

La centaine de mesures d'austérité (dont la baisse des salaires et la hausse de la TVA) imposées par le FMI n'a fait que renforcer cette aversion contre les agences. Dans les débats télévisés, sur les bancs des facs ou dans les réseaux sociaux, le sujet est devenu omniprésent. Pour José Reis, autre plaignant, également économiste à Coimbra, "ces trois agences ont pêché à trois titres: elles concentrent 90% de la notation financière, ce qui est une entrave à la libre concurrence; elles possèdent des fonds d'investissement, il y a donc conflit d'intérêts; et elles bénéficient d'infos privilégiées. Nul ne conteste les problèmes structurels de l'économie portugaise, mais nous refusons que des intérêts privés dictent notre sort".
Même analyse de Manuel Brandão Alves, prof d'éco à Lisbonne. "A travers ces agences, nous voulons pointer du doigt leurs clients, les principaux responsables: intermédiaires financiers, fonds de pension, et même certains Etats..."

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